Le Living Lab couleur Carrefour Numérique²

Chargée de projet du Living Lab du Carrefour Numérique², Laurence Battais est souvent interrogée sur ce concept, peu connu en France et plus abstrait que le Fab Lab. Voici une petite synthèse pour mieux l’appréhender.

Peu connu en France, abstrait, complexe, le concept de Living Lab valait plus que quelques lignes dans le glossaire pour être cerné. Littéralement, un Living Lab est un laboratoire vivant, comme le disent sans honte nos ami·e·s les Québécois·e·s, ce qui évite un anglicisme de plus en « lab » qui fleure bon le bullshit bingo. Pour éviter un abus de jargon à base de co-blah blah, on dira simplement que les laboratoires vivants pratiquent l’innovation ouverte en incluant les usager·e·s le plus en amont possible.

Il y a plusieurs points communs d’un lieu à l’autre, détaille Laurence, chargée de projet Living Lab (et qui a déjà répondu 42 fois à la question “c’est quoiiiiii un Living Lab ?”) : les Living Labs travaillent sur les TIC (Technologies de l’information et la communication), ils impliquent des acteur·trice·s différent·e·s – chercheur·se·s, usager·e·s, entreprises, collectivités locales, associations, etc. -, le public intervient à plusieurs moments de la conception et l’évaluation est importante. Pour le reste, leur profil est très varié : le Living Lab d’Orange, entreprise cotée au CAC 40, n’a rien à voir avec le Mandalab au Québec, où la dimension de lien social est très forte.

Test d'usages

Test d’une application en cours de conception au Living Lab – mars 2013

 

Le concept n’est pas nouveau mais il a connu une impulsion forte à partir de 2006, avec le programme European Network of Living Labs (ENoLL), lancé sous la présidence finlandaise. Depuis le réseau a continué de grossir, soutenu par une association basée en Belgique, pour atteindre environ 300 Labs labellisés, dans l’Union Européenne et au-delà. Comme pour les Fab Labs, il ne faut pas s’arrêter aux étiquettes, d’autant plus que les critères sont souples : certaines démarches, comme par exemple cette construction d’une médiathèque avec les habitant·e·s dans le Limousin, relèvent du Living Lab sans avoir le label.

Axé sur l’apprentissage et l’éducation via les TIC

Concrètement, qu’y fait-on ? On peut travailler sur les tablettes numériques (NdlR : arrêté en mai 2013), l’autonomie des personnes âgées, la ville etc. bref, le champ d’application est très large et contribue à son image floue. Après avoir appréhendé ce concept qu’elle devait s’approprier rapidement, l’équipe a choisi son orientation, dans la continuité des activités précédentes. Le nôtre est axé sur l’apprentissage/l’éducation via les TIC, explique Laurence. Au Carrefour Numérique², on travaille plus particulièrement sur la robotique éducative, le jeu vidéo, le serious game, serious gaming et la gamification. Avec les autres membres du consortium Inmediats qui ont un Living Lab, on mutualise nos réflexions, nos retours d’expérience, on se conseille les uns les autres, rajoute-t-elle. Le Living Lab du Carrefour Numérique² est aussi membre de France Living Lab.

Dès la phase de conception du projet, l’équipe s’est appuyée sur son public de prédilection, les jeunes de 15 à 25 ans, pour affiner ses thématiques : Nous avons soumis les thématiques à des focus groupes pour avoir leurs retours, la bande dessinée en faisait partie au début par exemple. La robotique est très vite ressortie, elle suscite des débats de société : “ça va nous piquer notre boulot”, réagissaient certain·e·s. C’est un secteur soutenu par le plan Montebourg. Il est important de pouvoir participer à la réflexion sur les usages et les pratiques.

Robotique éducative, jeux vidéo,serious game et gamification

Le Carrefour Numérique² pouvait déjà aussi s’appuyer pour son travail de préfiguration du Living Lab sur l’expérience du laboratoire LUTIN UserLab. Cette structure universitaire (Paris 8, Paris 6, UTCompiègne) nichée dans la Cité des sciences est aussi labellisée Living Lab. Nous avons travaillé avec eux, sur les robots LEGO Mindstorm comme outil d’apprentissage des sciences et techniques avec les enfants, dans le cadre du projet européen Pri-sci-net, développe Laurence. Des enfants ont participé à des ateliers, sous le double regard de l’équipe de recherche, et plus particulièrement d’Ilaria Gaudiello, et celle de la médiation. Le projet a abouti à des formations de robotique éducative proposées à la suite par le LUTIN UserLab. L’idée avec le Living Lab c’est de travailler avec le public pour élaborer de nouvelles pratiques mais aussi après d’être en soutien pour “disséminer” ces pratiques, poursuit Laurence. Les enseignant·e·s, animateur·trice·s et autres professionnel·le·s de l’éducation peuvent donc suivre ces formations. Nous avons apporté un lieu ouvert au public, convivial, notre plateau technique mais aussi notre expérience de médiation avec les publics.

Formation robotique éducative

Enseignant lors d’une session de formation à la robotique éducative au Living Lab – mars 2014

Des collaborations avec d’autres acteur·trice·s ont eu lieu déjà. Les collègues de l’établissement font aussi appel à eux : un élément de l’exposition “quel type de joueur êtes-vous ?” pour “Jeu vidéo, l’expo” a été testé avec du public. Les personnes âgées ont aussi été l’objet d’une étude menée autour des tablettes.

Plus récemment, le week-end Minecraft “Des cubes et des pioches” a été l’occasion de tester la dévolution de la programmation d’un événement à une communauté. On n’était pas tous chauds au début pour laisser la main : “à quoi sert-on ?” se demandaient certain·e·s, se souvient Laurence. 11 000 visites plus tard, les interrogations sont tombées : l’équipe a permis à des jeunes de passer un bon week-end autour d’un jeu aux nombreux usages pédagogiques, encore trop méconnus en France.

Et surtout, Laurence insiste : Notre Living Lab n’est pas un show room, nous ne sommes pas là pour montrer des technologies comme dans une vitrine ou aider les entreprises à trouver des arguments de vente mais bien pour leur permettre de travailler le plus tôt possible avec les utilisateur·trice·s pour concevoir des ‘produits’ répondant aux besoins de la société. L’appel est lancé : elle invite les équipes de recherche et autres acteur·trice·s de la société à me contacter pour venir en résidence au Living Lab. Notre lieu est ouvert à tou·te·s celles et ceux qui veulent travailler avec les utilisateur·trice·s et qui rejoignent nos axes de travail “l’apprentissage et les TIC”.

Sabine Blanc

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