Les hackathonien·ne·s ont codé dur pour animer Nao

Durant la Fête de la science 2013, cinq équipes de jeunes ont imaginé et testé des scénarios d’usage pour le robot humanoïde Nao autour de la question : et si vous aviez un robot dans votre vie ?

La vaisselle, les devoirs, des gâteaux, jouer, aider les personnes âgées…, que feriez-vous si vous aviez un robot dans votre vie ? C’est à cette question que le public a été invité à répondre lors de la Fête de la science, mi-octobre, le temps d’un hackathon de 36 heures organisé par le Carrefour Numérique² avec le soutien d’Aldebaran Robotics. Du vendredi au dimanche, cinq équipes interdisciplinaires composées de jeunes de 18 à 25 ans ont développé des scénarios d’usage autour du robot Nao. Pendant qu’elles bossaient d’arrache-pied, les passant·e·s pouvaient écrire au mur mais aussi sur Twitter leurs suggestions ou impressions et échanger avec les équipes. Ce premier hackathon s’inscrivait dans la démarche Living Lab du Carrefour Numérique², qui propose à des entreprises de concevoir avec le public de nouveaux usages, dans une démarche ouverte.

Créée en 2005, Aldebaran Robotics est connue pour son petit robot humanoïde Nao. Il est surtout utilisé dans un cadre pédagogique, pour apprendre la programmation, une version plus coûteuse et évoluée des LEGO Mindstorm. Il est aussi utilisé dans les laboratoires de recherche, par exemple pour interagir avec les enfants autistes. L’entreprise souhaite à l’avenir se positionner sur le prometteur marché de la robotique personnelle, estimé à 8 milliards de dollars en 2015, avec l’espoir de générer enfin des bénéfices.

Développer la communauté

Le but du hackathon n’était pas tant de faire naître des concepts révolutionnaires – avec ses 310 employés, Aldebaran a déjà de la matière grise qui phosphore sur les usages -, que d’inciter des jeunes à travailler dans la robotique. La France est un des pays les plus avancés dans la recherche en intelligence artificielle, mais on manque d’ingénieurs et de techniciens, en particulier des femmes, indique Astrid Desjobert, responsable marketing. On espère que certains participants intègreront une communauté de développeurs, et aussi que la Cité des sciences continuera à s’intéresser à la robotique. Mais je ne m’attends pas à voir une application géniale.

Les hackathonien·ne·s devaient développer non pas un produit fini, mais un prototype, séduisant, utile et interactif , dans la limite des capacités de Nao et du contexte : Son ordinateur est aussi évolué qu’un smartphone de dernière génération, précise Philippe, de Génération Robots, une société qui forme les clients d’Aldebaran, un des coaches des équipes. Les participant·e·s ont découvert sur place la bête, ses contraintes et ses possibilités.

Des bugs et des applaudissements

Le public a découvert dimanche en fin de journée les réalisations. Les applaudissements nourris en dépit des bugs traduisent la fascination que les robots exercent sur l’homme et la reconnaissance pour le travail fourni en si peu de temps, au prix de quelques cernes et de beaucoup de boissons caféinées. L’équipe Robeez a présenté son robot-majordome, portant fièrement gilet noir et moustache de cuivre. On est des feignants, on voulait donc un domestique, plaisante Rudy, le rapporteur. Il a été programmé pour inscrire des événements dans l’agenda d’une famille et promener un cochon (en plastique). Enfin en théorie, car le logiciel de reconnaissance vocale nécessite du calme, ce qui n’est pas facile devant une troupe d’enfants, du coup, le serviteur est un peu dur d’oreille. Et sa démarche est chancelante car il n’aime pas trop la moquette.

Leurs camarades de la Nao Hack Team se sont orientés vers l’humour : Daniel fait des plaisanteries et en apprend, là aussi si le logiciel de reconnaissance vocale est d’accord. Mais ces bugs à répétition constituent en eux-mêmes un gimmick comique qui amuse bien le public. Un des spectateurs interroge sur la licence du code développé durant le hackathon. Le code n’appartient pas à Aldebaran, précise Laurence Battais, en charge du Living Lab, on a incité à documenter pour encourager à l’innovation et au choix d’une licence libre Pour nous, ce sera licence libre, précise l’équipe. En revanche, le règlement stipule que les participants et participantes concèdent à Universcience et ses partenaires une licence d’exploitation des droits de propriété intellectuelle sur les travaux produits lors du hackathon dans le cadre de manifestations culturelles ou de promotion de la culture scientifique et technique.

Ludique, éthique, pratique

Les membres de l’équipe NⒶo Future ont souhaité non pas développer une application mais faire une expérimentation sociale pour s’interroger sur ce qu’est un robot humanoïde, être dans sa tête, bref se poser des questions éthiques. Nao, rebaptisé John, réagit mais pas comme on l’attend d’un bon robot : il fait la tête, donne des claques. Un site a également été développé pour montrer la personnalité de ce robot qui se pose des questions existentielles et ressent des émotions. Sur sa table de chevet, on trouve Ecce homo ou bien encore Humain, trop humain du philosophe Friedrich Nietzsche.

Ils ont tous lu Asimov, ils poseront des limites automatiquement, estime Fabien Ruggieri, chercheur du laboratoire LUTIN UserLab. Le célèbre écrivain de science-fiction a codifié dans ses écrits les trois lois de la robotique, qu’il est nécessaire de respecter pour éviter des dérives éthiques.

Le programme conçu par Alfa V fait une petite entorse à la morale, très humaine : il triche aux cartes, comme un vrai compagnon de jeu. L’équipe n’a eu aucun mal à trouver un participant pour le tester : les petits menottes se sont levées d’un coup. Mais pour se livrer à de subtils tours de passe-passe avec les cartes, c’est plus compliqué : les mains de Nao ne sont pas prévues pour saisir des objets plats et on a bien galéré juste pour qu’il s’empare des cartes, précise le rapporteur.

L’expérience ludique a aussi motivé la dernière équipe : le Nao de Sparkle joue les maîtres du jeu. L’équipe a imaginé un scénario autour du hackathon : un Nao est retrouvé débranché, ses batteries à plat. Qui a bien pu le tuer ? Les membres ont scénarisé dix heures de jeu, selon le principe d’un Cluedo. Les nombreux accessoires ont été réalisés sur place, dans le Fab Lab. Pour ne pas frustrer le public, on est allé très vite à la phase « solution ». John, le Nao qui se pose des questions, est le coupable : il voulait savoir si un robot peut vivre sans batteries.

Malgré les divers aléas, les participants ont exprimé leur satisfaction de jouer, le temps d’un week-end, avec ce jouet qu’ils aimeraient bien trouver au pied du sapin. Et l’équipe du Carrefour Numérique² a soufflé dimanche soir, satisfaite de ce premier hackathon. Avec un seul gros regret : mais pourquoi n’existe-t-il encore pas de robots pour ranger les tables et aller acheter l’apéritif ?

Retrouvez la documentation des projets sur le wiki du Carrefour Numérique².

Sabine Blanc

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